2008-05-26

Les militants de la dignité

Le verdict récemment rendu public par le tribunal de l’Ordre public espagnol ou la soi-disant Audience Nationale, au-delà d’avoir emprisonné une cinquantaine de citoyens basques, finit d’achever le plus populaire et important quotidien abertzale du XXe siècle, c’est-à-dire EGIN. EGIN naquit en 1977 avec le soutien de milliers de citoyens. Son objectif était tout simplement d’informer sur tous les sujets dont les médias de l’époque ne parlaient pas ; et de faire une place aux associations, syndicats, groupements locaux, mouvements pour l’amnistie et à tous ceux qui n’avaient pas accès aux médias qui étaient directement ou indirectement liés au franquisme.

Il apparaissait à l’époque que ce nouveau média, qui n’avait pas l’appui des grandes banques et entreprises, allait faire faillite tôt ou tard. Mais il alla de l’avant, et malgré les problèmes il se retrouva dans les kiosques jour après jour pendant 20 ans. Et il aurait dû continuer de paraître, si la police, à la demande du juge Baltasar Garzon et par l’impulsion politique du chef de gouvernement Jose Maria Aznar, ne l’avait pas fermé de force.

Les bases du verdict que nous avons officiellement connu le 19 décembre dernier, ont été fixées ce malheureux 15 juillet 1998. Par ce verdict, et suivant le slogan “tout est ETA”, 13 personnes d’EGIN ont été punies. Plus précisément, accusés d’avoir collaboré ou de faire partie de l’ETA, Jose Luis Elkoro, Patxo Murga, Isidro Murga, Pablo Gorostiaga, Jexusmari Zalakain, Karlos Trenor, Xabier Salutregi, Teresa Toda, Manuel Intxauspe, Xabier Alegria et Maite Mendiburu ont été condamnés. Iñaki Zapiain et Xabi Otero, en revanche, ont été condamnés pour des délits économiques. Pour des raisons de santé le procès de Jose Ramon Aranguren fut reporté et les charges contre Ramon étaient classées sans suite. Manu Aranburu, décédé dans un accident de voiture, n’a pas été jugé.

Nous qui signons ce texte, avons connu ces personnes au travail, et nous savons qu’elles ont toujours milité pour la dignité de leur pays. Leur engagement était celui-là. Nous savons également que c’est par une stratégie élaborée à Madrid qu’elles ont été mêlées à des affaires d’ETA. Cette stratégie a pour but d’agresser le mouvement indépendantiste mais surtout, les secteurs les plus engagés.

Ces personnes, comme toutes celles du dossier 18/98, ont été victimes d’un jugement qui était décidé à l’avance. Pour des raisons d’Etat. Elles n’ont pas eu le droit d’être jugées par des juges naturels dans leur pays, et elles n’ont pas eu droit à avoir un procès juste. Le procès qui a duré un an et demi, a été en lui-même une peine infligée aux prévenus, parce qu’ils n’ont pas pu travailler ou vivre normalement, confrontés à des frais énormes.

Ceux qui ont élaboré et exécuté cette stratégie répressive ont d’immenses moyens de propagande, et par ces moyens ils ont trompé les citoyens espagnols, et ont fait croire que même s’ils n’avaient pas d’armes, ils étaient des redoutables terroristes. Au Pays Basque, en revanche, la grande majorité sait bien qu’ils ont été punis parce qu’ils participaient à la construction du Pays Basque, parce qu’ils ont travaillé pour l’indépendance et parce qu’ils ont lutté pour l’amélioration des conditions de vie de tous.

Ainsi, nous demandons que le jugement soit annulé et que le tribunal de l’ordre public espagnol soit dissous. Nous souhaitons que les condamnés soient en Pays Basque et libres dans les plus brefs délais.

Joxerra Bustillo, Karmele Elizaran, Alex Oiartzabal, Mertxe Aizpurua, Lurdes Etxeberria, Marian Beitialarrangoitia, Maria Eugenia Martinez, Pilar Iparragirre, Jose Mari Martinez, Amaia Ereñaga, Ixiar Arteaga, Martin Anso, Dabi Lazkanoiburburu, Txisko Fernandez, Ramon Sola, Eguzki Agirrezabalaga, Martxelo Diaz, Begoña Arrondo et nombreux ex-salariés de EGIN.

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